Constructing Illusion
Analix Forever, Geneva
21 avril – 21 juin, 2015
Curator: Barbara Polla
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Pour sa quatrième exposition personnelle à la galerie Analix Forever à Genève, mounir fatmi explore cette fois-ci la question de l’illusion.
En février 2015, fatmi, dans « Permanent Exiles », présente au MAMCO (Genève) une oeuvre intitulée Constructing Illusion (2015) : une sculpture en acier, avec un système de miroirs tels qu’utilisés par les médecins-chercheurs qui s’intéressent à l’analyse et au traitement des « membres fantômes ». Ce phénomène se réfère à la sensation persistante de la présence d’un membre après que celui-ci ait été amputé : le cerveau « se souvient » et recrée le membre inexistant. Les visiteurs de l’exposition peuvent tester leurs propres perceptions en introduisant l’un de leurs bras dans la sculpture-miroir de fatmi.
Le nom de cette pièce devient alors le titre de l’exposition d’Analix Forever : « Constructing Illusion ». fatmi élargit le concept du cerveau comme fabrique à illusion physique, à celui de fabrique à illusions multiples, en particulier religieuses, et explore ces illusions avec une rigueur esthétique absolue.
L’expérience du membre perdu, du membre fantôme puis du membre reconstitué, multiplié par le miroir, est traitée par des photographies d’une grande élégance, tout à la fois concrètes et allusives. L’illusion devient réalité.
Autre émotion fondatrice du travail de mounir fatmi : celle du lien. Le lien, souvent représenté par des câbles. Des câbles qui devraient nous permettre de communiquer mais qui, dans les œuvres de fatmi, se retrouvent le plus souvent, tels le « cordon ombilical culturel », morcelés. Il s’agira alors de recréer ces liens, un processus auquel fatmi travaille constamment, non sans nous mettre en garde : ce qui se prétend lien, quand il n’est pas amour, peut devenir corde, et peut enfermer, séparer, emmurer, menacer, exclure. « Qui a besoin d’un dieu triangle ? » nous demande ainsi fatmi avec deux tableaux–bas reliefs.
Deux vidéos complètent l’exposition : Le Silence de Saint Pierre Martyr (2011) et Architecture Now (2010). La première nous ouvre un piège béant, car la beauté des images de fatmi fascine. Mais elles sont elles aussi illusion, alors que la critique de l’idée que la foi justifie la torture des non-croyants se perçoit et surtout s’entend aussi, quand bien même le Saint nous enjoint le silence. Une vidéo à retrouver aussi dans VIDEO FOREVER le 22 avril à Paris, au Musée de la Chasse et de la Nature. La seconde, Architecture Now, nous montre la destruction systématique d’immeubles désaimés et nous laisse pantois devant la fantasmagorie de membres-fantômes architecturaux qui paraissent désormais, eux aussi, des illusions du passé.
Barbara Polla, Avril 2015