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46. | Kissing Precise
 
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  • 2013, 16 jumping poles, 4 meters high.
    Exhibition view of Intersections, Keitelman Gallery, 2013, Brussels.
    Courtesy of the artist.
    Ed. of 1 + 1 A.P.

The Kissing Precise installation can be perceived as the response to a desire for control and poetry that borders on an obsession with mounir fatmi.

It constitutes a harmonious and skillfully dosed association of formal precision and poetic sensitivity.


Studio Fatmi, August 2017





 




Installation réalisée en 2013, Le Baiser précis attire le spectateur au moyen d'un dispositif sculptural composé de barres de saut hippique et de peinture d'extraits de poème. L'installation donne à voir 16 barres d'obstacle longues de 4 mètres chacune, dont une extrémité repose au sol, tandis que l'autre est appuyée contre un mur, selon différents angles. Les barres sont peintes en noir et blanc et recouvertes d'inscriptions tirées du poème "The Kiss precise" du mathématicien et prix Nobel de chimie Soddy, œuvre littéraire inspirée du théorème de Descartes sur les cercles tangents.

Le Baiser précis s'inscrit dans la recherche d'un dispositif d'exposition du désir à l'œuvre dans toute forme de rencontre, que celle-ci concerne des personnes distinctes, des domaines artistiques différents ou qu'elle allie réalité et fiction. L'installation opère ainsi l'union des arts dits "plastiques" et de la poésie et étudie les effets de leur mise en relation. Les références au poème de Soddy sont nombreuses dans le travail de Mounir Fatmi et s'illustre à travers différents médias : le projet photographique Casablanca Circles fait le lien entre la biographie de l'artiste et l'imaginaire cinématographique ; ailleurs, la série des sculptures intitulée La Mort de la ligne droite se constitue comme l'exploration de la structure profonde d'un événement à partir du croisement des techniques de l'abstraction et de la représentation figurative.

L'installation Le Baiser précis réalise la mise en présence commune d'éléments hétérogènes et fait se rencontrer de manière inédite des objets et des motifs récurrents du corpus artistique, tenus séparés jusqu'ici : les barres d'obstacle comme figure de la mise à l'épreuve du réel, la référence au poème de Soddy liée à ses recherches structurelles et ses expérimentations géométriques, le recours au noir et blanc et à la répétition permettant une approche dialectique et dynamique des phénomènes étudiés.

Elle permet ainsi d'observer les effets de la rencontre : la perception de chacune des œuvres et leur nature même se voient modifiées par la présence de l'autre. Le texte se lit verticalement et non plus horizontalement. Les vers ont été extraits de leur bloc poétique d'origine et le texte a un caractère discontinu au lieu d'être continu. L'espace discontinu quant à lui, composé d'objets divers, tend au contraire à s'unifier sous les efforts de lecture exercés par le spectateur.

La mise en présence commune d'éléments plastiques et textuels permet finalement à partir de l'observation de leur effets réciproques d'en découvrir les affinités et la nature profonde : poésie et arts plastiques ont justement pour point commun la vocation à découvrir des liens et à établir des relations et ils participent d'une même recherche des fondements du réel.

L'installation Le Baiser précis se propose comme une réponse à un désir de maîtrise et de poésie confinant à l'obsession chez Mounir Fatmi. Elle constitue l'association harmonieuse et savamment dosée de rigueur formelle et de sensibilité poétique. Elle participe à la fondation d'une figure plastique, d'une métaphore structurante et sensible au sein de l'œuvre de l’artiste : celle du baiser, comme figure de la rencontre et des correspondances artistiques, équation du désir alliant sensualité et rigueur formelle.


Studio Fatmi, Aout 2017.



Le baiser précis

Si, quand des paires de lèvres veulent s’embrasser
De trigonométrie elles peuvent se passer.
Ce n’est pas le cas pour quatre cercles qui se frôlent
Chacun les trois autres, à tour de rôle.
Pour réussir cela, le quatuor doit
Être tel trois en un, ou un en trois.
Si l’un est en trois, alors sans aucun doute
Chacun reçoit trois bises qui lui viennent d’outre.
Si trois sont en un, alors cet un
Reçoit les trois baisers en son sein.

Quatre cercles viennent à s’embrasser.
Les plus petits sont les plus courbes.
La courbe n’est que l’inverse
De la distance depuis leur centre.
Or, si leur mystères Euclide faisaient choir,
A présent, nous ne tâtonnons plus dans le noir.
Puisque zéro courbure est une bien droite ligne
Et du moins les courbes concaves portent toutes le signe,
La somme des carrés des quatre courbes
Vaut le carré de leur somme par deux divisé.

Pénétrer les affaires des sphères
Est une tâche laquelle, peut être,
Lasserait un géomètre oscillomètre.
La sphère est beaucoup plus gaie,
D’autant, qu’outre la paire de paires
L’osculation se partage avec une cinquième sphère.
N’empêche, signes et zéro sont comme avant,
Pour que chacun embrasse les quatre autres
Le carré de la somme des cinq courbes
Égale la somme de leur carrés.

Frederick Soddy, radio-chimiste britannique,
Prix Nobel de Chimie en 1921.
In Nature, 20 Juin 1936

 

 

  An installation created in 2013, Kissing Precise draws in the viewer with a sculptural installation made of horse jumping bars and painted excerpts from a poem. The installation comprises sixteen 4-meter long jumping bars, one end on the floor, the other resting against a wall, with various angles. The bars are painted black and white and covered in words taken from the poem “The Kiss Precise” by mathematician and chemistry Nobel prize winner Professor F. Soddy, a text inspired by a theorem by René Descartes on tangent circles.

Kissing Precise is part of the search for a means to exhibit desire, which is at play in any type of encounter, whether between individuals, different artistic domains or between reality and fiction. In this way, the installation creates a union of so-called “plastic” arts and poetry and studies the effects of their connection. References to Soddy’s poem are rife within Mounir Fatmi’s work, across different media: the photography project Casablanca Circles creates a connection between the artist’s biography and cinematographic fantasy; the series of sculptures entitled The Death of the Straight Line takes the form of an exploration of the deep structure of an event based on the conjunction of the techniques of abstraction and figurative representation.

The Kissing Precise installation puts heterogeneous elements in the presence of each other and brings together in an unprecedented way recurrent objects and motifs from his artistic corpus that were kept separate up to then: the jumping bars as a representation of the trials of reality, the reference to Soddy’s poem connected to his structural research and geometric experimentations, the use of black & white and repetition allowing a dialectic and dynamic approach to the examined phenomena.

It thus enables us to observe the effects of the encounter: the perception of each piece and their very nature are modified by the presence of the others. The text is read vertically instead of horizontally. The verses were extracted from their original poetic block and the text is discontinuous instead of continuous. On the other hand, the discontinuous space composed of various objects tends to unify itself under the viewers’ efforts to read. 


Finally, the bringing together of plastic and textual elements allows us, through the observation of their reciprocal effects, to uncover their affinities and their true nature: poetry and plastic arts have in common the vocation to discover relations and establish connections, and they both have to do with a quest for the foundations of reality.

The Kissing Precise installation can be perceived as the response to a desire for control and poetry that borders on an obsession with Mounir Fatmi. It constitutes a harmonious and skillfully dosed association of formal precision and poetic sensitivity. It participates in the foundation of a plastic figure, of a structuring and sensitive metaphor within the artist’s work: that of the kiss as a symbol for encounters and artistic correspondences, an equation of desire combining sensuality and formal precision.










Studio Fatmi, August 2017.




The Kissing precise
 

For pairs of lips to kiss maybe
Involves no trigonometry.
’Tis not so when four circles kiss

Each one the other three.

To bring this off the four must be

As three in one or one in three.
If one in three, beyond a doubt

Each gets three kisses from without.

If three in one, then is that one

Thrice kissed internally.

Four circles to the kissing come.

The smaller are the benter.

The bend is just the inverse of

The distance from the center.

Though their intrigue left Euclid dumb
There’s now no need for rule of thumb.

Since zero bend’s a dead straight line

And concave bends have minus sign,

The sum of the squares of all four bends

Is half the square of their sum.



To spy out spherical affairs
An oscular surveyor

Might find the task laborious,

The sphere is much the gayer,

And now besides the pair of pairs

A fifth sphere in the kissing shares.

Yet, signs and zero as before,

For each to kiss the other four
The square of the sum of all five bends
Is thrice the sum of their squares.



Frederick Soddy, British radio-chemist,
Nobel Prize in Chemistry in 1921
In Nature, June 20, 1936