Inspirée du film « L'Enfant sauvage » de Truffaut (réalisé en 1970), histoire d'un enfant sauvage recueilli par un médecin qui entreprend de faire son éducation, la compilation sonore « The Beautiful Language » aborde les thèmes de l'éducation et du langage. Tissée de distorsions numériques répétitives et de stridences inquiétantes, son univers sonore, loin de rappeler l'innocence des jeux d’enfants, évoquerait plutôt une expérience de laboratoire qui aurait mal tournée, menée par un scientifique au comportement cruel.
Thèmes centraux dans l'univers artistique de mounir fatmi, l'éducation, la relation pédagogique, le langage et son acquisition sont ici envisagés comme des processus essentiellement ambivalents : à la fois possibilité d'épanouissement et d'ouverture pour le sujet apprenant et également risque de conditionnement restrictif et d'aveuglement ; à la fois attention à l'autre et violence exercée sur les plus faibles. Les répétitions et claquements secs évoquent une mise au pas violente. Les sons numériques et industriels rythment une déshumanisation progressive de l’enfant dont la présence n'est signalée que par les bips d'un moniteur cardiaque. Les distorsions rendent compte de la douleur éprouvée par le jeune élève soumis aux processus d'apprentissage et renvoient à l'idée d'une déformation infligée au sujet, d'un déchirement et d'une séparation d'avec soi-même.
Les martèlements répétés de touches d'une machine à écrire closant la bande-son font enfin le lien entre l'histoire de la colonisation et de l'esclavage et celle du développement de l'administration et de la bureaucratie, responsables de l'effacement et de la réécriture de nombre d'histoires individuelles. La compilation sonore « The Beautiful Language » invite à une prise de conscience d'une forme de violence au cœur même de tout projet éducatif, si bien intentionné soit-il, ainsi qu'à une forme de subversion pédagogique qui commence par la remise en question des rôles au sein de la situation d’apprentissage.
Studio Fatmi, Aout 2019.
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Inspired by François Truffaut’s movie “The Wild Child” (filmed in 1970), the story of a wild child taken in by a doctor who decides to manage his education, the sound compilation “The Beautiful Language” addresses the questions of education and language. Comprising repetitive digital distortions and unsettling strident sounds, its sonic environment, rather than the innocence of children’s games, is evocative of a laboratory experiment gone wrong, led by a cruel scientist.
Central themes in mounir fatmi’s artistic universe such as education, the pedagogical relation, language and its acquisition, are seen here as essentially ambivalent processes, as both a possibility for the emancipation and mind opening of the learner and a risk of generating restrictive conditioning and blindness; both a sign of attentiveness towards the other and a form of violence exercised against the weak. The repetitions and brutal bangs are evocative of a virulent disciplining. The digital and industrial sounds mark the rhythm of a progressive dehumanizing of the child whose presence is only signaled by the beeps of a heart rate monitor. The distortions relate the pain experienced by the young student submitted to the learning process and have to do with the idea of a deformation inflicted upon the subject, a ripping and a separation from oneself.
The repetitive hammering of a typewriter’s keys that ends the sound piece ultimately creates a link between the history of colonization and slavery and that of the development of administration and bureaucracy, which are responsible for the erasing and rewriting of countless individual stories. The sound compilation “The Beautiful Language” invites us to acknowledge a form of violence at the very heart of any educational endeavor, well-intentioned as it may be, as well as a form of pedagogical subversion that starts with questioning the roles in the context of a teaching situation.
Studio Fatmi, August 2019.
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