Le travail saisissant de Mounir Fatmi explore souvent les dynamiques culturelles complexes produites par la circulation et la « translation » des gens, des objets et des idées. Des forces globales alternatives sont contestées de façon ambivalente par la création d’objets transculturels, tels que ces disques qui rappellent à la fois les hadiths musulmans, des pièces mécaniques et les Rotoreliefs de Marcel Duchamp. Les symboles de l’« Islam » sont désacralisés tout en étant réorientés pour mettre en question les perceptions réductrices de l’islam et la tendance à polariser les cultures musulmane et non-musulmane. Mixology a été produit à l’origine sous forme de vidéo (2010, 11'4), dans laquelle deux disques noirs en rotation, sur lesquels ont été peints des hadiths en calligraphie islamique de couleur blanche, apparaissent comme des disques sur les platines d’un DJ. Un montage complexe d’images montre les mains du DJ faisant scratcher ou tourner les disques et manipulant les boutons. Ces images sont accompagnées d’un mélange tout aussi complexe de sons électroniques distordus, souvent perçants, et d’extraits de musique classique couvrant le bruit perturbant produit par le diamant du tourne-disque grattant la peinture.
Le CD consiste en des sons créés pendant la production de cette vidéo. Chacune des huit pistes superpose, ou alterne entre eux, des fragments de musique classique et des sons électroniques improvisés, associés à des bruits déconcertants générés par les disques qui tournent et d’autres actions parfois impossibles à identifier. (Les extraits de musique classique sont issus de la 9e Symphonie en Ré mineur de Beethoven (opus 125, « Chorale »), de sa 6e Symphonie en Fa majeur (opus 68, « Pastoral »), de sa « Créature de Prométhée » (opus 43), ainsi que du Requiem de Mozart. L’interaction polyphonique de tous ces sons incohérents rappelle la caractérisation par Edward Said des rencontres interculturelles en tant qu’« ensembles en contrepoint » ; chaque son est « privilégié alternativement », son volume augmentant ou diminuant, ou devenant inaudible. Toutefois, l’ensemble de Mounir Fatmi met en avant la dissonance et la discordance. L’ordonnancement propre à la musique classique est continument perturbé par les sons et les rythmes qui résistent aux systèmes musicaux et qui ne sont identiques qu’à eux-mêmes. L’utilisation du son souligne l’ambivalence produite visuellement par l’image du vinyle tournant sur lequel est peinte la calligraphie musulmane, encourageant la reconnaissance de la ‘non-translatibilité’ des rencontres culturelles.
Siobhán Shilton, Université de Bristol
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Mounir Fatmi's striking work frequently explores the complex cultural dynamics produced by the global circulation and 'translation' of people, objects and ideas. Alternative global forces are ambivalently contested through the creation of transcultural objects, such as the discs that allude simultaneously to Islamic hadiths, machinery and Duchamp'sRotoreliefs.Symbols of 'Islam' are desacralised, while being re-oriented to question reductive perceptions of Islam and the tendency to polarise Muslim and non-Muslim cultures. Mixology was first produced as work of video art (2010, 11'4), in which two black spinning discs painted with white Islamic calligraphic hadiths appear as records on a DJ's mixing table. A complex montage of shots displays the DJ's hands scratching or spinning the records and manipulating the controls. The visuals are accompanied by an equally complex mixture of distorted, often piercing, electronic sounds and excerpts of classical music over the unsettling noise produced by the record-player needle as it scrapes away at the paint.
The CD consists of sounds made during the creation of this video. Each of the eight tracks superimposes – or alternates between – ready-made fragments of classical music and improvised electronic sounds, together with disconcerting noises generated by the turning discs and other, at times unidentifiable, processes. (The excerpts of classical music are taken from Beethoven's Symphony no. 9 in D minor (opus 125, 'Choral'), Symphony no. 6 in F major (opus 68 , 'Pastoral') and 'The Creatures of Prometheus' (opus 43), as well as Mozart's Requiem.) The polyphonic interplay of discrepant sounds is reminiscent of Edward Said's characterisation of cross cultural encounters in terms of a 'contrapuntal ensemble'; each sound is 'alternately privileged', increasing or decreasing in volume, or becoming inaudible. However, Mounir Fatmi's ensemble foregrounds dissonance and disharmony. The order integral to the classical music is perpetually disrupted by sounds and rhythms that resist musical systems and that are identical only to themselves. This use of sound heightens the ambivalence produced visually by the cover image of a spinning vinyl painted with Islamic calligraphy, encouraging the recognition of 'untranslatability' in cultural encounters.
Siobhán Shilton, University of Bristol
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